Chaque fois, c’est pareil. Deux jours avant le retour en classe, je me réveille tôt, trop tôt, genre tôt que tu te dis oh là là beaucoup trop tôt ! et que tu te rendors. Normalement ce rendormissement là, il est bon, super bon, il dit que tu as le temps, que tu peux chouchouter Morphée qu’est pas un mauvais bougre, donc tu profites, tu ronronnes, tu souris dans ton sommeil.

Et c’est là, qu’elles apparaissent. Mes angoisses de maîtresse. Toutes. Totalement infondées et débiles. Dans le désordre. Elles viennent dans mon sommeil sous forme de rêve répétitif, de ceux que tu te dis dans ton rêve que tu voudrais changer de rêve vu que celui là est ridicule. Liste :

1. Je ne sais pas quelle est cette école dans laquelle j’arrive le matin, je ne reconnais rien, le préau est sombre (et résonne affreusement, mais ça c’est du cauchemar réel) et l’escalier censé m’amener dans ma classe ne se termine jamais.
2. Je ne connais pas ces enfants, et ils sont immensément nombreux, et où sont les autres adultes ? et je suis donc seule toute seule et le préau est infini et il y a une marée de gosses dont aucun visage ne m’est familier.
3. Je suis dans la classe et j’ai la tête totalement vide. Ils sont là, ils attendent, ils commencent à chahuter normal ils attendent, et moi : je ne sais pas par quoi commencer, aucune idée, rien, le flou, le brouillard, et je balbutie, et je cherche frénétiquement sur mon bureau où je ne trouve que des très gros livres qui n’ont absolument rien à voir avec mon programme CE1-CE2. 
   
4. Je tente vainement de parler aux enfants mais ma voix ne porte pas, une pauvre voix fluette et ridicule, inaudible. Ils me regardent sans rien comprendre.
5. Je suis prise d’une fatigue insondable en pleine classe, je ne cesse de m’endormir sur les tables des enfants.
6. Mais où il est ce putain de stylo rouge ?

Ensuite, je me lève, un peu en panique, et je me dis allez au boulot, ça va calmer mes angoisses. Et j’arrive à mon bureau. Et puis, bon, finalement, j’écris un billet pour le blog.

(Dessin : Jack Koch)