« T’façon, ça m’étonne pas, c’est eux les chouchous, alors… »
La petite phrase est discrète, mais audible, et je me tourne vers l’enfant qui l’a prononcée. Sourcils froncés sur sa bouderie, sa déception, sa frustration. Il faut dire que l’affaire est grave, ils sont tous passés au tableau chacun leur tour pour écrire un mot invariable, il en reste deux à corriger, et je désigne pour les prolongations la gamine dys (voir ici pour les détails) et celui qui est à l’école à mi-temps (voir ici pour les raisons et ma colère d’alors). Je ne développe pas les causes professionnelles qui me poussent à interroger deux fois ces deux-là, vous êtes grands, c’est limpide. Pour ce petit monsieur, en revanche, c’est moins clair, puisqu’il le vit comme un signe de préférence indiscutable. (Au passage, je vous apprends -peut-être- à quel point les élèves d’aujourd’hui adorent passer au tableau, être interrogés, montrer leur travail, réciter leur poésie, etc. ce qui prouve que les ambiances de classe ont bien changées, mais c’est un autre sujet.)
Alors on a discuté ensemble de cette affaire de chouchous.
-Ben, oui, quoi ! répond l’auteur de l’accusation, tu es toujours à les interroger, à les aider, et tout et tout, tu les préfères, c’est sûr !
Réponse immédiate et sans appel de la gamine dyslexique : « Ben moi tu vois, je préférerais que maîtresse n’ait pas besoin de venir m’aider tout le temps… » (oui, je sais, cette gamine est incroyable…)
Je lui ai expliqué qu’il confondait « plus d’attention », et « plus d’affection ». Pour certains c’est l’évidence même, pour d’autres, je le sens, c’est plus confus. Alors je leur ai dit que j’étais attentive à chacun, mais que bien-sûr, ils n’ont pas les mêmes besoins, donc pas les mêmes aides de ma part.
-Regarde, par exemple, depuis le début de l’année, j’aide Gus à faire ses lacets. (Gus acquiesce vigoureusement : ces lacets ! On n’en vient pas à bout…) Tu veux que je te fasse les tiens ? (le gamin rigole tant l’idée lui paraît idiote) Non, c’est inutile, tu y arrives parfaitement tout seul. En revanche, tu aimes bien que je m’avance vers toi quand tu batailles avec les multiplications à deux chiffres, non ?
On a donné d’autres exemples, et en sortant de classe, je lui ai dit : « Alors, rassuré ? » Il a souri tout grand, il a dit oui oui, il a haussé les épaules. Rassuré, oui, peut-être. Pas complètement convaincu pour autant… Et pourtant… Si je devais absolument dire lequel d’entre eux je préfère, je serais bien en peine de donner une réponse…
J’adore tes histoires d’école et sans lassitude aucune !
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Pourtant il va y avoir un blanc de deux mois ! 😉
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je t’envie ! ..j’adore les mômes (qui me le rende extraordinairement bien !)
une vraie complicité ! ..no jugement, nature et spontanéité, no calcul,
il suffit de se-pencher (!) de ‘savoir’ que je suis -nous le sommes tous ! un ex-gamin,
peut-être de friser Asperger (?) donne qql code, clé, ..d’entrée ce monde de Merveille
post ado, réalisant cette (déjà) affection, compréhension, copinage, je disais (rien à voir de qql contradiction à la JJ Rousseau) : »l’Homme, dès qu’il a des poils, il devient con »
tu sais que j’ai 3 filleules (ou nièces) et 2 filleuls (ou neveux) sans aucun lien de parenté, et qql ados,
les enfants: mes meilleurs copains ! loyauté, franchise et honnêteté,
Cheers
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je ne peux pas dire que j’ai galéré (en primaire) mais ce n’était pas la joie !
on était ‘aux ordres’, et plutôt intérêt ! même un indexe taché d’encre.. source de problemo,
ah oui.. chouette ! ça a changé (au-tableau par ex. vécu comme une ‘punition’; non, on ne se bousculait pas pour y aller) ça donnerait/tu donnes, l’envie d’y retourner..
aussi j’aime bien le dessin (égalité-équité) = explicite !
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Oui, les choses ont bien changé et heureusement ! Certains imaginent que d’être plus à l’écoute rend les élèves moins respectueux, mais c’est le contraire qui se passe, j’en suis persuadée. Quand il y en a, les bêtises sont faites par manque de discernement, par excès d’excitation, par une immaturité dans la gestion des émotions, mais jamais pour nous faire chier, nous adultes, ce qui n’était pas le cas autrefois (et là, je répète les mots de mon père qui a 70 ans). Ils ont confiance dans l’adulte, ils se tournent vers nous quand ça ne va pas, ils grandissent en sécurité. Enfin, en tout cas, on essaye de créer ce contexte, du mieux qu’on peut. Et bien-sûr, on ne doit jamais oublier qu’ils sont petits, qu’ils apprennent, et que ça passe par des erreurs, des disputes, des couillonnades, des colères, etc. Mais quel adulte peut se vanter de ne jamais craquer, d’être toujours de bonne humeur, de supporter son prochain en toute circonstance, chaque jour et partout, de ne ressentir ni jalousie, ni impatience ?
Cheers, dear, à bientôt !
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