Son moral, déjà, n’était pas au top. Elle n’est pas coutumière de ce genre de déprime, d’habitude c’est une boule de vitalité, mais là, faut bien le dire, depuis quelques mois, elle peine. Elle cherche un sens, un signe, une énergie nouvelle, une raison d’être et de devenir, peut-être même une raison d’avoir été… On parlait depuis un long moment, on faisait tranquillement le tour de la question, on tentait de mettre de l’ordre dans ses ressentis et ses espoirs, dans ses colères et ses trous noirs. Et tout à coup, entre deux agacements, entre deux questionnements, elle gronde : « En plus, tu sais pas la dernière ? Il veut me reprendre son nom… »
Il, c’est l’ex. Le père des. L’entente est solide, la complicité toujours présente, ils ont réussi, ces deux-là, à rester un couple parental accordé, jouant avec harmonie sur la même tonalité pour ce qui les lie encore, et si fort : la prunelle de leurs yeux à tous les deux. Mais là, pour des raisons qui lui sont propres, sûrement mûrement réfléchies et certainement recevables, il lui a demandé de lui rendre son nom.
Et ça, elle, ça l’écrase. L’a-t-il envisagé, la douleur immense que ça allait provoquer ? Non, sans doute non, mais le fait est, ça termine de lui foutre le moral tout au fond du seau. Parce qu’il se trouve que son nom à lui, qu’elle continue de porter, c’est aussi, c’est surtout pour elle maintenant, le nom de ses enfants. Ne plus porter le nom de ses enfants, ça ne lui paraît pas possible, ça lui paraît étrange. Et cette demande qui pourrait paraître légitime en devient violente.
Et puis il y a autre chose. Devoir renoncer à ce nom-là, ça veut dire reprendre celui d’avant. Et celui d’avant c’était celui du père, de son père à elle, de ce père qui ne lui a pas laissé que des bons souvenirs, c’est le moins qu’on puisse dire. Elle voudrait finalement ne porter que son prénom. Ce serait plus simple, dit-elle, plus vrai.
Le nom qu’on porte, nous les femmes, c’est l’histoire qu’on s’écrit. L’identité qu’on se reconnaît. Ce n’est pas anodin. Je n’ai pas la prétention d’apporter une solution. Mais il est vrai que ce sujet souvent me revient. Le nom changeant des femmes… imposé, retiré, celui du père, celui du mari, choisi, subi, adoré ou renié. Le fils qu’on aura qui le portera et par la force de la loi, le « sauvera ». Le nom de nos filles qui ne sera plus le notre. Le nom de nos petits-enfants qui sera celui de l’autre…
Le nom des femmes, le nom des gens n’est pas innocent.
J’aime me promener sur votre blog. un bel univers agréable. Blog intéressant et bien construit. Vous pouvez visiter mon blog récent. A bientôt.
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Je n’ai jamais pris le nom de mon ex-mari. Mon nom de famille est le seul signe « extérieur » de ma double nationalité.
Quand mon ex, à la maison communale, n’a pas inscrit mes fils sous nos deux noms (alors que c’était permis, mais il a prétendu le contraire, et comme c’était tout récent légalement, je l’ai naïvement cru), ça a été une vraie déchirure, pour moi – et ça l’est toujours, douze ans plus tard.
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Aïe… Si la chose avait été discuté avant, c’est évidemment une trahison, difficile à digérer.
En tout cas, ce texte résonne chez beaucoup (de femmes) et a éveillé la conscience de certains (hommes). Je me réjouis de l’avoir écrit, j’ai beaucoup hésité…
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Oui, il savait à quel point ça comptait pour moi…
Cet article était une bonne idée, oui ! 🙂
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Merci…
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Nommer, c’est définir, qualifier. Alors reprendre un nom c’est annuler la personne débaptisée. Au delà de ça, j’ai cherché une réflexion qui donne bonne image de mon petit cerveau et de ma conscience sociale, mais non, je trouve que le plus limpide est déjà dit là : « Donner c’est donner, reprendre c’est voler. »
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Carnets a dit.
Vous pouvez disposer.
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Je suis very étranger du machin-chose; marié une seule fois (incroyabeul, touchons du bois) aussi nul part le maire ou qql formulaire nous demandait de changer, modifier nos noms.
Ni l’option (idée ou tradition) nous interrogeait,
elle a dit oui, moi aussi, depuis on s’embrasse,
bref, elle a son nom (alsacien) moi le mien (romand) et tout va bien,
..ainsi les chats, Miaoow,
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Je suis très sensible à ce que vous écrivez, moi qui n’ai officiellement plus le droit de garder le nom de ma fille décédée. Je raconte ce douloureux épisode dans un article de mon blog : https://adomemots.wordpress.com/2016/12/09/qui-suis-je
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Très très touchant…
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