Accueil dans la cour hier matin, dernier jour de classe avant la fermeture des écoles pour trois semaines minimum. Tout le monde est au courant bien-sûr, et on ne parle que de ça.

Un papa vient me voir : « Je la garde à la maison. Mais c’est pas parce que j’ai peur, elle est vraiment malade. Non mais, rien de grave, hein, elle a juste vomi toute la nuit. Donc c’est pas « ça »… » (Ok, bon courage quand même !)

Une autre arrive : « Mais… la mairie organise un service de garde, non ? Comme pour vos grèves ? » (Heu…)

Une troisième se présente : « Si des gens ont besoin d’aide, pour garder les enfants, faire des courses ou n’importe quoi… comment je peux faire pour laisser mon numéro ? Dire que je suis dispo ? Il faut s’entraider, c’est capital. » (Merci madame…)

Ensuite, les gosses arrivent dans la classe. L’ambiance est survoltée, ça sent le savon parce qu’ils y sont tous passés, comme tous les jours depuis une semaine aux retours récré, départs cantine, retours cantine… 6 robinets dont 2 hors d’usage, pour 2 classes de 25… On explose la conso de papier essuie-main à usage unique, mais on a du savon et il est top.

On s’installe, je calme tout le monde, et les questions démarrent. Grosse explosion de joie après l’annonce officielle par mézigue de la fermeture de l’école. Ils le savaient tous bien-sûr, mais bon, c’est trop chouette quand même de regarder le copain en faisant une célébration à la M’Bappé. Je modère ce si grand bonheur (Rabat-joie, c’est mon deuxième prénom).

– Il n’y aura pas d’école pendant au moins trois semaines, mais je vais vous envoyer du travail à la maison. Par mail.

– Ah. Alors tu l’envoies à maman plutôt, parce que papa il est nul en mail. 

– C’est à cause du coronavirus. On peut mourir si on reste à l’école. 

– Ouais c’est parce que les chinois, ils ont mangé des chauve-souris. 

– Nous les enfants, on peut pas l’attraper mais le virus il est sur nous et du coup on peut tuer nos papys et nos mamies. 

– Et puis faut pas éternuer sur les copains et faut se moucher dans son coude. (!!)

– Maman a dit qu’il faut que je reste à un mètre vingt des gens. (Je lui ai demandé combien ça fait, 1m20 en centimètres -Rabat joie un jour, Rabat-joie toujours- et le gosse a répondu 12.)

– Le coronavirus, il est tout gris avec des petits pompons rouges.

– On peut quand même faire des soirées pyjamas ?

– Moi, mon plateau (de foot NDLR) est annulé, c’est trop nul !

– Et le rugby aussi c’est annulé ?

– Et le judo ?? 

– Et la pelote ??? (…basque, NDLR encore, on habite en Béarn, il y a des frontons et des trinquets partout. Et comme j’ai répondu qu’il pourrait sans doute continuer parce qu’il n’y a pas de contact direct, le gosse a lancé un regard satisfait aux footeux qui la ramènent toujours à la récré vu qu’y’en a que pour le foot dans ce monde mais j’apprends rien à personne)

– Papa il a dit que si on peut plus aller au hand, c’est pas grave on fera des balades en vélo. Et puis aussi on a le droit de continuer à faire des apéros. 

– Mais… si tu nous envoies du travail… on devra se lever quand même à 7h pour le faire ? Même si les parents ils dorment jusqu’à midi ?

– Maman a dit qu’ils vont nous envoyer des gens à la maison pour nous faire les devoirs, parce que elle, elle est travaille. 

Voilà, on a passé la journée à rectifier des fausses vérités et contredire des vraies conneries. On a rassuré, autant que possible. Et puis ils sont partis, avec leurs cartables remplis comme à la fin de l’année. Et vraiment, on en avait tous gros sur le cœur…

Donc, surtout, évitez de bouffer des chauve-souris.