J’ai pas fait ce métier pour ça. J’ai pas fait ce métier pour me retrouver toute seule derrière mon écran toute la journée. J’ai mal à la tête, j’ai mal en bas de la nuque, j’ai mal derrière les yeux, j’en ai marre de pas les voir, ils me manquent, putain comme ils me manquent ! Ça n’a pas de sens, c’est vaseux, ça pue, c’est relou.

J’ai pas fait ce métier pour ça.

Mais quand même, au fond, il n’y a pas que du noir, là-dedans. Il se noue des relations inédites avec les parents. Je vois jour après jour la confiance énorme qu’ils me donnent, les efforts qu’ils font pour me tenir au courant, avec des photos des cahiers, des retours sur les réussites, les ratés, des blagues aussi, des clins d’œil, et pleins de gentils messages qu’ils m’envoient. Ça me réconforte, vous pouvez pas savoir.

Et puis les enfants m’écrivent. Et ça messieurs dames, c’est jubilatoire. Coucou maîtresse, je fais ceci, je fais cela, tu me manques, bisous ! Avec une photo de leur bouille tout sourire au-dessus du gâteau tout chaud sorti du four, dont ils ont recopié la recette en s’appliquant à mort, parce que c’est pour offrir à toute la classe. Je suis le point central, ça passe par moi, je transmets, et ça me rend fière, ouais, j’avoue. Pas croyable comme être loin nous rapproche, nous lie d’une manière encore plus forte.

J’y passe un temps de dingue, pire que quand j’étais dans une classe unique à six niveaux la première année de ma carrière. J’ai pas pu écrire une ligne de mon roman, c’est dire… mais l’un d’eux m’a envoyé ce dessin, ce matin, et je me suis dit, en écrasant une larme, que je marnais pas pour rien.

David Ferreira est un artiste de Pau (Jurançon plus précisément) dont les œuvres sont très colorées, dynamiques, gaies. Tout à fait le genre qui fait du bien en ce moment ! Il propose sur son profil Facebook, pendant le confinement, des coloriages pour les enfants.